Liviu Poenaru
[Version française ci-dessous]
In 2024, the global average screen time on the Internet is about 6 hours and 37 minutes per day (as of January 2023). This figure includes the use of various Internet-connected devices, such as smartphones, computers, and tablets source. This raises questions about the exposure to economic codes injected or associated with the viewed content, and, with these codes, the relationship to the iconic world and its consequences.
Screen time varies across generations:
Generation Z (1996-2010): approximately 7 hours and 18 minutes per day.
Millennials (1981-1995): approximately 6 hours and 42 minutes per day.
Generation X (1965-1980): approximately 6 hours per day.
Baby Boomers (1946-1964): approximately 2 hours and 54 minutes per day.
Key Statistics
Every day, an average American spends around 7 hours and 4 minutes in front of their screen.
People worldwide spend about 6 hours and 58 minutes on their screens on a daily basis.
Since 2013, there has been an increase in screen time by 50 minutes per day.
Gen Z (people born between 1996 and 2010) spend about 9 hours of screen time every day.
There was a peak in the average daily screen time of 7.7 hours among people during the COVID-19 pandemic.
The top three popular sites consumed by Millennials, Gen X, and Baby Boomers are Amazon, Facebook, and Google.
On average, people spend about 44% of their waking hours looking at a screen.
Professionals have recommended less than 2 hours of screen time a day.
49% of babies between the ages of 0 to 2 have interacted with smartphones at some point
These increasingly excessive practices of Internet use involve, in addition to access to education, culture, and entertainment, simultaneous exposure to a scopic bombardment via images. The scopic bombardment of cybercapitalism is a powerful force that shapes the values and aspirations of individuals in contemporary society. The emphasis on images of wealth and material success is supported by economic, technological, and psychological structures that promote and reinforce these representations.
The digital age, much like neo-liberal culture, first raises the issue of addiction. From a psychopathological perspective, addiction is situated within a narcissistic framework structurally conceived as a borderline state:
"In the vast majority of clinical forms of dependence observed today, there is a structural inconsistency and immaturity (...); the economic background appears quite evidently of a depressive nature, and the observed symptoms, the defense mechanisms (including toxic dependence), constitute a cry for help to a magical and external object to avoid falling into depression" (Bergeret, 1981, p. 12).
It is in this inevitable search for the magical antidepressant object (linked to the ordinary addiction of capitalism) that we are all currently trapped. Ehrenberg (2012) further recalls an observation that has been intriguing psychoanalysts for several years:
"The evolution of society is marked both by a decline in Oedipal structures and by a reduction in the number of childhood psychoses thanks to the development of a specialized professional network" (p. 173).
The World Health Organization seems to share this view:
"Between 1990 and 2013, the number of people suffering from depression and/or anxiety increased by nearly 50%, from 416 million to 615 million. Nearly 10% of the world's population is affected, and mental disorders account for 30% of the global non-lethal disease burden" (WHO, 2016).
These figures, as we know, have been significantly altered by the Covid-19 pandemic (which we might consider, rightly or wrongly, as an exceptional phenomenon in epidemiological history).
An ordinary addiction, not meeting all the criteria of pathological addiction but nearly so, is easily identified in daily screen usage. There are now sufficient surveys demonstrating that screen time is increasing year by year, having literally exploded during the 2020-2021 pandemic, which naturalized digital addiction. Before these events, Houghton et al. (2015) already noted a dramatic increase in screen time among children and adolescents. Despite this increase (and health warnings) not being immediately associated with addiction, scientific studies systematically seek predictors of addiction and tend to correlate screen time with supposed preexisting psychological disorders (Cocorada et al., 2018), without questioning the addiction induced by social network engineers, etc. Something is thus being repressed once again, posing a huge epistemic and health problem!
REFERENCES
Bergeret, J. (1981). Introduction à l’étude sur la personnalité du toxicomane. Psychologie clinique et projective, 32, p. 9-16.
Cocorada, E., Maican, C.I., Cazan, A.-M., Maican M.A. (2018). Assessing the smartphone addiction risk and its associations with personnality traits among adolescents. Children and Youth Services Review, 93, oct. 2018, p. 345-354.
Ehrenberg, A. (2012). La société du malaise. Paris : Odile Jacob.
Houghton, S., Hunter, S.C., Rosenberg, M., Wood, L., Zadow, C., Martin, K., Shilton, T. (2015). Virtually impossible: limiting Australian children and adolescents daily screen based media use. BMC Public Health, https://doi.org/10.1186/1471-2458-15-5
ADDICTION ORDINAIRE: CE QUE LES DONNÉES ÉPIDÉMIOLOGIQUES NE DISENT PAS
En 2024, la moyenne mondiale de temps d'écran sur Internet est d'environ 6 heures et 37 minutes par jour (en janvier 2023). Ce chiffre inclut l'utilisation de divers appareils connectés à Internet, tels que les smartphones, les ordinateurs et les tablettes [source]. Cela soulève des questions sur l'exposition aux codes économiques injectés ou associés aux contenus visualisés et, avec ces codes, sur le rapport au monde iconique et ses conséquences.
Le temps d'écran varie selon les générations :
Génération Z (1996-2010) : environ 7 heures et 18 minutes par jour.
Millennials (1981-1995) : environ 6 heures et 42 minutes par jour.
Génération X (1965-1980) : environ 6 heures par jour.
Baby Boomers (1946-1964) : environ 2 heures et 54 minutes par jour.
Statistiques clés
Chaque jour, un Américain moyen passe environ 7 heures et 4 minutes devant son écran.
Les gens du monde entier passent environ 6 heures et 58 minutes par jour devant leurs écrans.
Depuis 2013, il y a eu une augmentation de 50 minutes par jour du temps d'écran.
La génération Z (personnes nées entre 1996 et 2010) passe environ 9 heures par jour devant leurs écrans.
Il y a eu un pic du temps d'écran quotidien moyen de 7,7 heures pendant la pandémie de COVID-19.
Les trois sites les plus populaires consommés par les Millennials, la Génération X et les Baby Boomers sont Amazon, Facebook et Google.
En moyenne, les gens passent environ 44 % de leurs heures d'éveil à regarder un écran.
Les professionnels recommandent de passer moins de 2 heures par jour devant un écran.
49 % des bébés âgés de 0 à 2 ans ont déjà interagi avec des smartphones à un moment donné [source].
Ces pratiques de plus en plus excessives de l'utilisation d'Internet impliquent, en plus de l'accès à l'éducation, à la culture et au divertissement, une exposition simultanée à un bombardement scopique via des images. Le bombardement scopique du cybercapitalisme est une force puissante qui façonne les valeurs et les aspirations des individus dans la société contemporaine. L'accent mis sur les images de richesse et de réussite matérialiste est soutenu par des structures économiques, technologiques et psychologiques qui favorisent et renforcent ces représentations.
Le digital, comme la culture néo-libérale, pose en premier la question de l’addiction. D’un point de vue psychopathologique, l’addiction est située dans un registre narcissique structurellement conçu comme un état-limite :
« Il s’agit, dans une immense majorité des formes cliniques de dépendance observée à l’heure actuelle, d’une inconsistance structurelle et d’une immaturité (…) ; le fond du tableau économique apparaît de toute évidence comme de nature dépressive et les symptômes observés, les mécanismes de défense (dont la dépendance du toxique) constituent un appel à l’aide à un objet magique et extérieur pour éviter de tomber dans la dépression » (Bergeret, 1981, p. 12).
C’est dans cette inéluctable recherche de l’objet magique antidépressif (en lien avec l’addiction ordinaire du capitalisme) que nous sommes actuellement tous enfermés. Ehrenberg (2012) rappelle par ailleurs un constat qui interpelle les psychanalystes depuis plusieurs années :
« L’évolution de la société se marque à la fois par un déclin des structurations œdipiennes, mais aussi par une réduction du nombre de psychoses infantiles grâce au développement d’un tissu professionnel spécialisé » (p. 173).
L’Organisation mondiale de la santé paraît du même avis :
« Entre 1990 et 2013, le nombre de personnes souffrant de dépression et/ou d’anxiété a augmenté de près de 50 %, passant de 416 millions à 615 millions. Près de 10 % de la population mondiale est affectée et les troubles mentaux représentent 30 % de la charge de morbidité mondiale non létale » (OMS, 2016).
Ces chiffres, nous le savons, ont été significativement modifiés par la pandémie de Covid-19 (que nous pourrions considérer, à tort ou à raison, comme un phénomène exceptionnel de l’historique épidémiologique).
Une addiction ordinaire, ne répondant pas à tous les critères de l’addiction pathologique mais presque, est repérée facilement dans les usages quotidiens des écrans. Il existe dorénavant suffisamment d’enquêtes démontrant que le temps d’écran augmente d’année en année, alors qu’il a littéralement explosé pendant la pandémie de 2020-2021 qui a naturalisé l'addiction numérique. Avant ces événements, Houghton et al. (2015) soulignent déjà une augmentation dramatique des temps d’écran chez les enfants et les adolescents. Malgré cette augmentation (et les alertes sur la santé) qui n’est pas immédiatement associée à la dépendance, les études scientifiques recherchent systématiquement les prédicteurs de la dépendance et tendent à corréler le temps d’écran avec des troubles psychologiques (Cocorada et al., 2018) supposés préexistants, sans questionner la dépendance induite par les ingénieurs des réseaux sociaux, etc. Quelque chose est donc refoulé encore une fois et pose un immense problème épistémique et sanitaire !
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